Communiqué de presse

Image haute résolution d’Eta Carinae

L’interféromètre du VLT détecte l’existence de vents violents au sein d’un système stellaire massif bien connu

19 octobre 2016

Une équipe internationale d’astronomes a utilisé le VLTI (Very Large Telescope Interferometer) pour cartographier, avec une précision encore inégalée, le système d’étoiles Eta Carinae. De nouvelles structures, pour le moins inattendues, ont été détectées au sein de ce système binaire – notamment dans l’espace situé entre les étoiles où des vents stellaires extrêmement puissants interfèrent. L’acquisition de ces nouvelles données sur cet énigmatique système stellaire pourrait contribuer à affiner notre connaissance des processus d’évolution des étoiles très massives.

Une équipe d’astronomes dirigée par Gerd Weigelt de l’Institut Max Planck dédié à la Radioastronomie (MPIfR) a acquis, au moyen Very Large Telescope Interferometer (VLTI) situé à l’Observatoire de Paranal de l’ESO, une image unique du système d’étoiles Eta Carinae dans la Nébuleuse de la Carène.

Ce système binaire de dimensions étendues se compose de deux étoiles massives en orbite l’une autour de l’autre, sièges de puissants vents stellaires dont la vitesse atteint les dix millions de kilomètres par heure [1]. De leurs multiples interférences résulte une importante turbulence, au sein de la région qui sépare les deux étoiles – une zone longtemps demeurée inaccessible à toute étude.

La puissance dégagée par la paire d’étoiles Eta Carinae se traduit par la survenue de phénomènes dramatiques, telle cette “Gigantesque Eruption” observée par les astronomes vers 1830. Nous savons aujourd’hui que cette éruption résulta de l’expulsion, par l’étoile la plus étendue du système, de vastes quantités de gaz et de poussière sur une échelle de temps très courte. Elle donna lieu à l’apparition de lobes distincts, aujourd’hui encore visibles, qui composent la Nébuleuse Homunculus. Les collisions, à des vitesses extrêmement élevées, des vents stellaires issus de l’une et l’autre étoiles, ont pour effets de porter le milieu environnant à des températures voisines de plusieurs millions de degrés et de générer d’intenses déluges de rayons X.

La région centrale, siège des collisions entre ondes de pression, est si peu étendue – un millier de fois plus petite que la Nébuleuse Homunculus, que les télescopes au sol et dans l‘espace sont longtemps demeurés incapables de précisément la cartographier. L’équipe a utilisé l’énorme potentiel, en termes de résolution, de l’instrument AMBER qui équipe le VLTI, afin de sonder, pour la toute première fois, ce turbulent royaume. Une astucieuse combinaison – selon le principe de l’interférométrie – de trois des quatre Télescopes Auxiliaires du VLT, a permis d’augmenter d’un facteur dix le pouvoir de résolution que procure une seule Unité Télescopique du VLT, et d’obtenir l’image la plus détaillée à ce jour du système, et d’acquérir des données inattendues concernant sa structure interne.

Cette nouvelle image acquise par le VLTI révèle clairement l’existence inattendue d’une structure, en forme d’éventail, entre les deux étoiles du système Eta Carinae, précisément là où le vent puissant issu de l’étoile la plus petite et la plus chaude, interfère avec le vent de densité plus élevée en provenance de l’étoile de dimensions plus étendues.

“Nos rêves sont devenus réalité le jour où nous sommes parvenus à acquérir des clichés extrêmement détaillés dans le domaine infrarouge. Le VLTI nous offre l’incroyable opportunité d’affiner notre compréhension des processus physiques à l’œuvre au sein du système Eta Carinae et de nombreux autres objets astrophysiques tout aussi importants”, ajoute Gerd Weigelt.

Outre les images, les observations spectrales de la zone de collision ont permis de mesurer les vitesses des puissants vents stellaires [2]. Connaissant ces vitesses, l’équipe d’astronomes a été en mesure de générer des modèles numériques plus précis de la structure interne de cet incroyable système d’étoiles, ce qui contribuera à affiner notre compréhension des processus à l’origine de la perte de masse de ces étoiles extrêmement massives au cours de leur existence.

Dieter Schertl (MPIfR), l’un des membres de l’équipe, se réjouit :GRAVITY et MATISSE, deux des instruments nouvellement installés sur le VLTI, nous offriront des images interférométriques dotées d’un niveau de détail bien plus élevé et sur une gamme de longueurs d’onde plus étendue. Disposer de données sur une fraction plus large du spectre électromagnétique permettra de déterminer les propriétés physiques d’un grand nombre d’objets astrophysiques.”

Notes

[1] Les deux étoiles sont si massives et brillantes que le rayonnement qu’elles émettent arrache leurs surfaces et les expulse dans l’espace. Cette éjection de matière stellaire produit un “vent stellaire” susceptible de se déplacer à plusieurs millions de kilomètres par heure.

[2] Ces mesures ont été effectuées grâce à l’effet Doppler. Les astronomes utilisent l’effet Doppler (ou décalage spectral) pour déterminer avec précision la vitesse à laquelle les étoiles et d’autres objets astrophysiques s’approchent ou s’éloignent de la Terre. Ce déplacement dans l’un et l’autre sens se traduit par un léger décalage spectral dont il est possible de déduire la rapidité du mouvement.

Plus d'informations

Ce travail de recherche a fait l’objet d’un article à paraître au sein de la revue Astronomy and Astrophysics.

L’équipe est composée de G. Weigelt (Institut Max Planck dédié à la RadioAstronomie, Allemagne), K.-H. Hofmann (Institut Max Planck dédié à la RadioAstronomie, Allemagne), D. Schertl (Institut Max Planck dédié à la RadioAstronomie, Allemagne), N. Clementel (Observatoire Astronomique Sud- Africain, Afrique du Sud), M.F. Corcoran (Centre Goddard des Vols Spatiaux, Etats-Unis; Association des Universités de Recherche sur l’Espace, Etats-Unis), A. Damineli (Université de São Paulo, Brésil), W.-J. de Wit (Observatoire Européen du Ciel Austral, Chili), R. Grellmann (Université de Cologne, Allemagne), J. Groh (Université de Dublin, Irlande), S. Guieu (Observatoire Européen du Ciel Austral, Chili), T. Gull (Centre Goddard des Vols Spatiaux, Etats-Unis), M. Heininger (Institut Max Planck dédié à la Radioastronomie, Allemagne), D.J. Hillier (Université de Pittsburgh, Etats-Unis), C.A. Hummel (Observatoire Européen du Ciel Austral, Allemagne), S. Kraus (Université d’Exeter, Royaume-Uni), T. Madura (Centre Goddard des Vols Spatiaux, Etats-Unis), A. Mehner (Observatoire Européen du Ciel Austral, Chili), A. Mérand (Observatoire Européen du Ciel Austral, Chili), F. Millour (Université de Nice Sophia Antipolis, France), A.F.J. Moffat (Université de Montréal, Canada), K. Ohnaka (Université Catholique du Nord, Chili), F. Patru (Osservatoire Astrophysique d’Arcetri, Italie), R.G. Petrov (Université de Nice Sophia Antipolis, France), S. Rengaswamy (Institut Indien d’Astrophysics, Inde), N.D. Richardson (Université de Toledo, Etats-Unis), T. Rivinius (Observatoire Européen du Ciel Austral, Chili), M. Schöller (Observatoire Européen du Ciel Austral, Allemagne), M. Teodoro (Centre Goddard des Vols Spatiaux, Etats-Unis), et M. Wittkowski (Observatoire Européen du Ciel Austral, Allemagne).

L'ESO est la première organisation intergouvernementale pour l'astronomie en Europe et l'observatoire astronomique le plus productif au monde. L'ESO est soutenu par 15 pays : l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L'ESO conduit d'ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l'astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d'importantes découvertes scientifiques. L'ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l'organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L'ESO gère trois sites d'observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. À Paranal, l'ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l'observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde et deux télescopes dédiés aux grands sondages. VISTA fonctionne dans l'infrarouge. C'est le plus grand télescope pour les grands sondages. Et, le VLT Survey Telescope (VST) est le plus grand télescope conçu exclusivement pour sonder le ciel dans la lumière visible. L'ESO est le partenaire européen d'ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L'ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d'un télescope européen géant (E-ELT pour European Extremely Large Telescope) de la classe des 39 mètres qui observera dans le visible et le proche infrarouge. L'E-ELT sera « l'œil le plus grand au monde tourné vers le ciel.

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Gerd Weigelt
Max-Planck-Institut für Radioastronomie
Bonn, Germany
Tel: +49 228 525 243
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Dieter Schertl
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Ce texte est une traduction du communiqué de presse de l'ESO eso1637.

A propos du communiqué de presse

Communiqué de presse N°:eso1637fr
Nom:Eta Carinae
Type:Milky Way : Star : Grouping : Binary
Facility:Very Large Telescope Interferometer
Instruments:AMBER
Science data:2016A&A...594A.106W

Images

Vue détaillée du système Eta Carinae
Vue détaillée du système Eta Carinae
Image la plus détaillée du système Eta Carinae
Image la plus détaillée du système Eta Carinae
Image de la Nébuleuse de la Carène issue du Digitized Sky Survey
Image de la Nébuleuse de la Carène issue du Digitized Sky Survey
La Nébuleuse de la Carène dans la constellation de la Carène
La Nébuleuse de la Carène dans la constellation de la Carène
Vue panoramique des régions de WR 22 et d'Eta Carinae dans la nébuleuse de la Carène
Vue panoramique des régions de WR 22 et d'Eta Carinae dans la nébuleuse de la Carène
Une photographie, plusieurs histoires
Une photographie, plusieurs histoires
La nébuleuse de la Carène prise par le VST
La nébuleuse de la Carène prise par le VST
Eta Carinae
Eta Carinae

Vidéos

Zoom sur Eta Carinae
Zoom sur Eta Carinae
Eta Carinae et son environnement
Eta Carinae et son environnement